Séminaire Grammaire, Langage, Institution

Séminaire du 31 janvier 2018 de 18h30 à 20h sur « Grammaire, Langage, Institution » dans le cadre du séminaire extérieur (dir. Antonia Soulez) au Collège International de philosophie.

Intervention de Geneviève Brykman, professeure émérite à l’université Paris-Ouest
« Des pièges du langage à l’âge classique » (à partir de Locke et Berkeley) : comment dès le début des Lumières, Locke et Berkeley se chargeaient, à leur façon, de « détrôner » l’Être » !

C’est à l’âge classique que les philosophes ont repris très au sérieux l’examen critique du langage. Celui-ci constitue
1) le lien social originaire;
2) le véhicule des propositions varies (ou fausses).

On avait mi à l’écart les analyses de Platon sur la langage (le Cratyle ou le Sophiste), ainsi que la critique d’Aristote à l’endroit des Idées, oubli du langage au profit de l’établissement direct d’un savoir postulé comme « fondé » sur des idées innées, ou sur des a priori en quelque sorte naturellement donnés aux êtres humains.

Après Descartes, c’est au philosophe anglais Locke qu’il revient d’avoir, lors de la rédaction de son célèbre Essai concernant l’entendement humain (1690), pris conscience que, la plupart du temps, les désaccords entre les hommes étaient des malentendus, et que l’examen du langage ordinaire était prioritaire à toute enquête relative à la genèse de la connaissance humaine. D’où la question basique : comment à partir d’une expérience, toujours singulière, forme-t-on des termes généraux, compréhensibles pour un groupe d’êtres humains déterminé?

A cette question Locke répond dans l’Essai, II et surtout III: ce sont d’abord des idées singulières qui se forment dans l’esprit et sont comme des images des choses.

Ensuite, la capacité de l’esprit à percevoir des ressemblances ou des traits communs entre des objets ou des qualités (plusieurs chiens, plusieurs chaises, plusieurs nuances de rouge) , permet la formation d’images génériques dites idées générales abstraites .

Abstraire, c’est séparer : ainsi les qualités ou caractéristiques particulières de tel chien ou de telle table sont laissées de côté au profit du chien ou de la table en général; de même la diversité des rouges devient couleur etc…Or, les êtres humains sont capables d’employer des mots généraux qui correspondent à ces idées abstraites ; ils peuvent ainsi de parler des choses les plus diverses en quelque circonstance que ce soit. Et s’entendre à peu près sur un langage commun appris comme une « forme de vie ».

Le problème est que l’on peut former des idées de plus en plus abstraites et de plus en générales, qui sont tellement générales qu’elles sont vides de contenu. Et les mots qui leur correspondent sont tout aussi vides de sens: tels sont par ex. les termes (très prisés par les philosophes) : objet, chose, être, substance, Dieu, etc…

Il revient à Berkeley, marchant sur les traces de Locke, d’avoir perçu avant Kant qu’on pouvait mettre un terme aux combats sans fin des métaphysiciens, à condition d’en déterminer exactement la source. Pour Berkeley, il s’agit d’un mésusage foncier langage (Principes de la connaissance humaine, 1710): les philosophes parlent sans savoir ce qu’ils disent et se sont particulièrement battus sur le sens du mot être. Ce mot n’a de contenu que ramené à l’existence; or: exister, c’est percevoir ou être perçu.

Attention : Avoir téléphoné le matin-même du séminaire au 01 44 41 46 82 et donné son nom en mentionnant le responsable du séminaire, en l’occurrence Mme Antonia Soulez.

Lieu Le MESR à Paris, site de la Montagne Ste Geneviève, 5e, au 25 rue de la montagne Ste Geneviève (métro Maubert-Mutualité). Salle Germaine Tillon.

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