Revue philosophique de la France et de l'étranger

Vous pouvez consulter la version électronique du numéro « Animalités » de la Revue philosophique de la France et de l’étranger disponible sur Cairn et en version papier.

Revue disponible en ligne sur : https://www.cairn.info/revue-philosophique-2019-3.htm

Sommaire

  • « Animalités » (présentation du numéro), par Jean-Hugues Barthélémy
  • « État des lieux de la « question animale ». Enjeux théorico-pratiques », par Florence Burgat
  • « Expérimenter sur l’animal ? », par Raphaël Larrère
  • « Les droits de l’animal sous l’éclairage de la biologie », par Georges Chapouthier
  • « Les impensés philosophiques du jeu animal », par Vincent Duquenne
  • « Bestia Fecit. Prolégomènes à une techno-esthétique animale », par Ludovic Duhem

À la fin de L’Expression des émotions chez l’homme et les animaux, Darwin écrivait :
« Qui regarde un chien caresser son maître ou se préparer à attaquer un autre chien ou un homme, ou qui observe la physionomie d’un singe provoqué ou cajolé par son maître, est forcé d’admettre que leurs gestes et les mouvements de leurs traits sont presque aussi expressifs que ceux d’un homme »[1].

À la pensée révolutionnaire de l’évolution des espèces offerte par L’Origine des espèces, à celle, bouleversante pour l’époque, des origines animales de l’être humain lui-même dans La Filiation de l’homme et la sélection liée au sexe, s’ajoutait ici la possibilité d’une pensée de la complexité psychique et notamment émotionnelle des animaux non-humains via celle de leur expressivité communicationnelle, telle celle de ce chien qui, dit Darwin, « caresse son maître ». Notre époque est celle où la crainte de tomber par là dans l’anthropomorphisme laisse enfin la place à une compréhension nouvelle et plus fine dont Darwin est, une fois de plus, le grand précurseur, et Frans de Waal[2] l’actuel ambassadeur : contrairement à l’anthropomorphisme, qui part de l’humain et projette sur l’animal non-humain des qualités humaines, la reconnaissance lucide de la complexité de l’animal non-humain part de ce dernier afin de rendre compte de la (sur-)complexité humaine, qui ne sort pas de nulle part, et c’est en ce point que l’évolutionnisme initié par Darwin est aussi précieux philosophiquement qu’il est scientifiquement incontournable. Notre époque troublée, si elle est profondément agitée par les débats autour de l’animalité ou plutôt des animalités et de leurs droits, est-elle pour autant celle où pourra s’instaurer un nouveau paradigme philosophique suffisamment puissant pour répondre à la crise manifestement pluridimensionnelle qui la caractérise ?

[1] Charles Darwin, L’Expression des émotions chez l’homme et les animaux, trad. D. Férault, Paris, Payot & Rivages, 2001, p. 197.

[2] Voir notamment Frans de Waal, L’Âge de l’empathie. Leçons de la nature pour une société solidaire, trad. M-F. Paloméra, Paris, Les Liens qui Libèrent, 2010.

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